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Judaïsme et citoyenneté

Dernière mise à jour : 19 oct. 2021

Le principe talmudique "la loi du royaume est la loi" est l'un des rares principes indiscutés du Talmud


Voici le texte de mon intervention lors du colloque « Être citoyen malgré nos différences » qui s’est déroulé à Rennes le 28 novembre 2015


Comment les religions peuvent aider le croyant à être plus citoyen ? C’est une question qui a l’air simple mais comme vous le savez, lorsque nous étudions les religions, et plus spécialement le judaïsme, nous devons nous baser sur des textes bien précis.


J’ai donc choisi un texte ou plutôt une phrase du Talmud de Babylone. Le Talmud, texte bien plus long que l’ensemble de la Bible.


Donc la phrase que je voulais vous citer est tiré du Talmud de Babylone, Traité Baba Kama, chapitre 10 page 113a « La loi du pays est la loi », dina demalkhouta dina.

C’est à partir de cet adage talmudique exprimé en araméen, que les Juifs ont traversé le temps et l’espace.


Depuis l’antiquité, cet adage a été un mode de vie pour les juifs, ainsi, ils ont toujours respecté les lois civiles des pays où ils résidaient tout en pratiquant leur spiritualité.


Le principe talmudique dina demalkhouta dina, la loi du royaume est la loi, a une caractéristique propre : il fait partie des rares principes indiscuté mais le Talmud nous donne à travers d’exemples l’application de cet adage.


Le premier se trouve dans le traité Nedarim. Que nous dit ce texte ?


Il y énonce qu’un contribuable peut dire au percepteur que les biens que celui-ci s’apprête à saisir ne lui appartiennent pas. Le texte s’étonne qu’une telle chose soit permise. Mais pourtant, s’interroge le texte, la loi du royaume est la loi Nos sages répondent que cela n’est autorisé que dans le cas d’un percepteur qui agit de manière arbitraire, par exemple un percepteur qui fixe de son propre chef le montant de l’imposition. Mais si le montant de l’impôt est clairement défini et si le percepteur est un fonctionnaire, il est obligatoire de payer honnêtement ses impôts, la loi du royaume est la loi.


Le deuxième exemple se trouve dans le traité Baba kama. En partant du fait que la loi juive interdit de faire usage d’un bien volé, la question suivante se pose : comment peut-il être autorisé de passer sur un pont construit avec des rondins de bois saisis par l’administration chez des particuliers ? Si cette saisie est un vol, il est interdit de passer sur le pont. Mais, répond le Talmud à nouveau, la loi du royaume est la loi. L’administration peut saisir des bois pour construire des ponts, quitte au propriétaire à se faire dédommager par la suite. En d’autres termes, l’Etat a un droit d’expropriation en vue de réaliser des travaux d’intérêt public.


D’une manière générale, les décisions du pouvoir politique concernant la vie morale et religieuse comme la circoncision, l’abattage rituel ne peuvent contraindre le judaïsme.


Nous pouvons remarquer que le judaïsme est ici scrupuleusement laïc : il n’accepte pas que le pouvoir politique empiète sur son propre domaine et comme religion il accepte les règles du pouvoir.


Non seulement le judaïsme respecte le principe de laïcité mais en plus comme nous allons le voir il respecte le principe de l’universalité des lois tel qu’il est prévu par la Constitution.


Ainsi pour être valable, un décret royal doit encore avoir un caractère d’universalité, être une loi générale. Maïmonide (grand penseur du judaïsme 1135-1204) précise:


Un roi qui a saisi le domaine ou le champ de l’un des habitants du pays contrairement à la législation fixée est un voleur ; celui qui achète [ce terrain] au roi doit le restituer à son propriétaire. Le principe est le suivant: toute loi décrétée par le roi [fixant des règles de propriété] et applicable à tous et non pas seulement relative à tel individu en particulier, une telle loi est valable. Une acquisition faite en conformité avec cette loi n’est pas un vol ; en revanche, ce que le roi saisit chez telle personne contrairement à la loi connue de tous est un vol.


Que pouvons-nous tirer de tout cela ?


Par l’exemple de cette phrase du Talmud, nous comprenons que si les textes, donc la religion est citoyenne alors tous ceux qui respectent les lois de cette religion seront enclins à être citoyens.


Revenons à la France et à son histoire


Le 3 août 1789, trois semaines après la prise de la Bastille, l’abbé Grégoire s’écria à propos des Juifs : “Cinquante mille Français s’endorment ce soir comme des serfs, faites en sorte qu’ils se réveillent demain libres citoyens.”


Puis il fut demandé aux Juifs d’exprimer ses doléances. Les représentants de la communauté juive exprimèrent leur volonté de participer au mouvement historique qui allait transformer la France et l’Europe.


Ce n’est qu’en 1791 que l’on accorda les droits civiques aux juifs. Ce fut la première fois depuis l’année 70 que les Juifs devenaient citoyens.


Napoléon convoqua en 1807 une assemblée de notables juifs (le sanhédrin).

Le souci principal du grand sanhédrin avait été de montrer que les dogmes juifs se conciliaient avec les lois civiles françaises et c’est précisément ce que Napoléon désirait savoir. Les dignitaires juifs durent répondre à une douzaine de questions.


L’assemblée y répondit de la manière la plus claire en ne cédant rien sur les principes religieux tout en proclamant la soumission des Juifs à la loi civile française et leur attachement à l’empire.


Pour conclure je dirai qu’à travers le judaïsme nous pouvons voir que si les textes de la religion poussent à la citoyenneté alors les membres de cette communauté seront citoyens mais que l’Etat doit encourager les religions à être citoyennes.


En 1791, le député de la noblesse, le comte de Clermont-Tonnerre déclara : “ Il faut tout refuser aux Juifs comme nation et tout leur accorder comme individus.”


Permettez-moi de finir cet exposant en vous lisant la prière pour la République française, prière lue chaque samedi dans toutes les synagogues de France :


Éternel, Maître du monde, Ta providence embrasse les cieux et la terre ; la force et la puissance T’appartiennent ; par Toi seul, tout s’élève et s’affermit. De Ta demeure sainte, ô Seigneur, bénis et protège la République française et le peuple français. »

« Regarde avec bienveillance depuis Ta demeure sainte, notre pays, la République française et bénis le peuple français. «

« Que la France vive heureuse et prospère. Qu’elle soit forte et grande par l’union et la concorde. «

« Que les rayons de Ta lumière éclairent ceux qui président aux destinées de l’État et font régner l’ordre et la justice. «

« Que la France jouisse d’une paix durable et conserve son rang glorieux au milieu des nations. «

« Que l’Éternel accorde sa protection et sa bénédiction pour nos soldats qui s’engagent partout dans le monde pour défendre la France et ses valeurs. Les forces morales, le courage et la ténacité qui les animent sont notre honneur.”

« Que la France reste fidèle à sa noble Tradition et défende toujours le droit et la liberté.

« Accueille favorablement nos vœux et que les paroles de nos lèvres et les sentiments de notre cœur trouvent grâce devant Toi, ô Seigneur, notre créateur et notre libérateur. Amen »






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