Le piège du RN. S ’y rallier est une gifle à notre histoire
- gozlancontact
- il y a 20 heures
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Il y a des moments où le silence devient une faute morale.Et aujourd’hui, il faut le dire sans trembler : voir certains Juifs de France glisser vers le Rassemblement National est une trahison historique. Une trahison de notre mémoire. Une trahison de nous-mêmes.
Qu’on ne vienne pas me parler de « réflexe de survie ». Voter RN n’est pas un réflexe , c’est un renoncement.
Alors oui, il faut aussi le dire clairement : l’antisémitisme ne vient pas uniquement de l’extrême droite. Nous assistons aujourd’hui à une montée inquiétante de l’antisémitisme à l’extrême gauche, et, hélas, au sein d’une partie de la gauche traditionnelle. Des discours qui nieraient l’antisémitisme sous prétexte d’antisionisme, qui légitiment la haine des Juifs masquée sous des slogans politiques, qui relativisent notre souffrance ou la réécrivent, participent à ce climat toxique. Fermer les yeux sur cette réalité serait une faute politique et morale.
Le RN n’est pas devenu fréquentable : il est devenu habile
Le RN aime dire qu’il a « changé », qu’il n’est plus « comme avant ».Le RN n’a pas changé, il s’est simplement offert un tailleur bleu marine.
On peut repeindre une maison, changer les rideaux, donner un nouveau nom au propriétaire, mais les fondations restent ce qu’elles sont. Et les fondations du RN sont pourries par l’antisémitisme, au sens le plus brut.
Rappel de certains faits :
Jean-Marie Le Pen a qualifié les chambres à gaz de « détail de l’histoire » (RTL, 13 septembre 1987).
Il a déclaré que l’occupation allemande n’avait pas été “particulièrement inhumaine” (M, Le Monde, 2014).
Marine Le Pen disait encore en 2012 que le Vel d’Hiv « n’était pas la France », réécrivant l’Histoire pour dédouaner la collaboration.
Louis Aliot reconnaissait lui-même en 2011 :« Oui, il y a eu des antisémites au FN. C’est incontestable » (Europe 1).
Le parti peut tenter d’éteindre les incendies mais la fumée est toujours là.
Certains Juifs tombent dans un piège grossier
Il y a aujourd’hui des voix juives qui, au nom de la lutte contre l'antisémitisme islamiste,se laissent glisser dans les bras d’un parti qui a toujours considéré les minorités comme suspectes.
Je le dis : ce n’est pas du courage. C’est de la peur mal orientée.
Quoi de plus pratique pour le RN que de s’offrir une “caution juive” ? Une minorité contre une autre : la stratégie la plus vieille du monde.
Et certains tombent dedans volontairement.
Soutenir l’extrême droite, ce n’est pas seulement renier notre histoire : c’est aussi, indirectement, soutenir Vladimir Poutine. Or Poutine n’est pas seulement un danger existentiel pour l’Europe, pour la démocratie et pour la sécurité collective : il est également un danger profond pour Israël. Ses alliances militaires avec l’Iran, son soutien stratégique au Hezbollah et au régime syrien, et sa volonté de déstabiliser l’Occident renforcent des forces qui, chaque jour, menacent directement la sécurité d’Israël.Soutenir l’extrême droite française, dont une partie admire encore la Russie ou s’en inspire, revient donc à renforcer un axe géopolitique qui travaille contre les intérêts vitaux d’Israël comme des Juifs d’Europe. On ne peut pas prétendre défendre Israël tout en cautionnant, directement ou non, l’allié stratégique de ses pires ennemis.

Être pro-Israël n’interdit pas d’être profondément antisémite
C’est l’un des mensonges les plus dangereux de la période actuelle : « Puisqu’ils soutiennent Israël, ils ne peuvent pas être antisémites. »
Faux. Radicalement faux.
Deux vérités qu’il faut marteler :
On peut défendre Israël pour des raisons géopolitiques, religieuses, stratégiques — tout en détestant les Juifs de l’intérieur.
Les suprémacistes américains en sont l'exemple parfait : ils brandissent le drapeau israélien tout en alimentant les attaques antijuives sur leur propre sol.
On peut voir en Israël une forteresse occidentale — tout en continuant à considérer le Juif comme un « corps étranger » dans sa propre société.
Soutenir un État ne signifie pas aimer un peuple. Ceux qui oublient cela n'ont rien compris à l’histoire.
Rappel de certains faits :
Viktor Orbán (Hongrie) :
Il est pro-Israël sur le plan diplomatique et il mène dans son pays une campagne violemment antisémite contre George Soros (affiches, campagnes, insinuations de domination juive).
L’extrême droite américaine :
Très pro-Israël pour des raisons théologiques évangéliques, mais responsable de la majorité des attentats antijuifs aux États-Unis entre 2015 et 2023 (FBI Hate Crime Report).
Les suprémacistes blancs :
Certains disent soutenir Israël car « Israël défend l’Occident » mais considèrent les Juifs comme une « menace interne ».
Ce double standard existe également en Europe :Certains partis soutiennent Israël uniquement parce qu’Israël leur sert de bouclier civilisationnel contre l’islam, non par amour des Juifs.
Ceux qui banalisent l’extrême droite : une faute morale
Certaines voix juives médiatisées contribuent, volontairement ou non, à cette banalisation.
On peut citer, avec sources :
Gilles-William Goldnadel , minimise régulièrement le danger du RN.
Il déclarait : « Le RN n’est plus le diable » (CNews, 2021).
Éric Zemmour : affirme : « Le vrai danger n’est pas l’extrême droite » (France Inter, 2014). Il reprend des narratifs qui relativisent l’antisémitisme d’extrême droite au profit d’une lecture uniquement civilisationnelle.
Ces positions, bien que relevant de leur liberté d’expression, contribuent à normaliser des partis qui n’ont jamais renoncé à leurs fondamentaux.
L’antisémitisme du RN n’a jamais disparu : il a simplement changé de cible visible
Aujourd’hui, le RN a trouvé un ennemi beaucoup plus commode que les Juifs : les musulmans.C’est stratégique.C’est cynique.C’est utile électoralement.
Mais dans les discours internes, dans les réseaux identitaires, dans les franges radicales, le Juif reste suspect : élite, cosmopolite, financier, apatride.
Le discours classique de l’extrême droite n’a pas disparu. Il s’est déplacé. Il s’est camouflé. Il attend son heure.
Penser que nous serons épargnés est une illusion dangereuse.
En tant que Juif, accepter l’extrême droite est une abdication de notre histoire
Qu’on soit clair : nous n’avons pas survécu à vingt siècles de persécutions, d’exils, d’humiliations, de stéréotypes, pour finir collés sur les affiches électorales d’un parti d’exclusion.
Nous n’avons pas traversé la Shoah pour, en 2025, devenir la caution d’un parti qui n’a jamais demandé pardon pour ses racines idéologiques.
Chaque Juif qui banalise le RN donne une victoire symbolique à ceux qui, hier, nous niaient le droit d’être français.
Je suis Juif. Et c’est précisément pour cela que je refuse le R.N.
Je le dis frontalement :
Non, je ne tolère pas que certains membres de ma communauté défilent, consciemment ou non, vers l’extrême droite.
Non, je n’accepte pas que le RN devienne fréquentable sous prétexte de défendre Israël.
Non, je n’accepte pas que la peur justifie de trahir nos principes.
L’histoire ne pardonne jamais les compromissions avec ceux qui construisent leur force sur la haine, la division, la hiérarchie entre les citoyens.
Je préfère être menacé debout que protégé à genoux.




Merci pour cette analyse aussi lucide que vigilante. En ces temps troublés, nous avons le devoir de refuser le choix entre la peste et le choléra.